C comme Carrefour
Le saviez-vous : il y a actuellement 305 poteaux en forêt et 312 carrefours.
7 carrefours forestiers n’ont pas, à ce jour, de poteau : Cr de l’Abbaye, Cr du Chat Sauvage, Cr des Molineaux, Cr de la Faisanderie, Cr des Quatre Sapins, Cr du Rond Royal.
Les poteaux font environ 3,5 mètres de haut pour être lisibles à hauteur de cavalier. Les planchettes (jusqu’à 11 au Cr du Puits d’Antin) indiquent le nom du Cr le plus proche et le nom de la « route » (chemin) pour s’y rendre.
Dessin de François Léré, Archives de la ville de Compiègne, Bibliothèque Saint-Corneille
Les poteaux de carrefour de Compiègne portent une marque rouge orientée vers le château. Elle a été tracée à partir de 1853 pour permettre de retrouver facilement son chemin. La mention d’une décision de Napoléon III à la suite d’une promenade hasardeuse de l’impératrice Eugénie est rapportée par transmission orale mais aucun document n’en atteste. Cela vaut bien le mythe de la percée des Beaux-Monts évoquée précédemment.
L’ordonnance de réformation des eaux et forêts promulguée par Colbert en 1669 sous le règne de Louis XIV prévoyait déjà l’installation de poteaux indicateurs à tous les carrefours et même le long des routes, au seul usage des équipages de chasse à courre. il devrait avoir 12 pieds de long sur 10 à 12 pouces de large.
L’origine des noms des carrefours est peu documentée (je n’ai retrouvé aucun registre dans mes recherches aux différentes archives) mais elle était l’apanage du Contrôleur des bâtiments du Roi ou du Capitaine des chasses.
Avant la 2ème guerre mondiale, il n’y avait pas de boule au sommet mais un chapiteau de zinc (voire carte postale jointe). Selon les vagues successives d’installation et réparation, il y a eu une série de poteaux métalliques en fonte moulée dont il ne reste que 2 exemplaires à ce jours, au Cr du Bois Recouvré et au Cr de la Place aux Veaux.
Dès la fin de la 2ème guerre mondiale, les Eaux et Forêts ont entrepris d’ériger plus de 300 poteaux en béton à chaque carrefour.
Il y a 1200 kilomètres de routes et chemins sur le domaine forestier de Compiègne.
Les enceintes, appelées aujourd’hui parcelles, sont triangulaires pour faciliter la chasse à courre car 2 cavaliers partant du même carrefour suffisent à savoir dans quelle direction fuit l’animal poursuivi.
Toute la structuration de la forêt de Compiègne que nous connaissons aujourd’hui n’est faite qu’au seul et exclusif besoin des chasses à courre royales : les routes croisées et les enceintes en triangle, les hauts poteaux d’orientation, les ponceaux pour permettre le passage des chevaux et des calèches à bride abattue. L’exploitation forestière était extrêmement limitée et totalement stoppée dès lors qu’un Roi arrivait à Compiègne. Ce sont ces mêmes rois qui ont ordonné de très nombreuses plantations pour uniformiser le couvert forestier qui était au Moyen Age extrêmement décousu (mais ce sera pour un autre jour …) et leur permettre d’avoir ainsi un exceptionnel espace naturel pour le développement du grand gibier de chasse.
En 1521, il y a donc bientôt 500 ans, François 1er fait ouvrir 4 routes se croisant au « Cr des Routtes » (renommé « Puits du Roi » sous Louis XIV). Ces routes ne seront nommées qu’en 1564 : Route du Moulin (au nord) > Route de Champlieu (au sud) ; Route du Carnois (à l’ouest) > Route de la Mariolle (à l’est) ; Route de Royallieu (nord-ouest) > Route de Morienval (sud-est) ; Route du Pont de la Reine (sud-ouest) > Route du Pont de Berne (nord-est). Aucun carrefour n’est alors nommé. Il fait également ouvrir les « routes » (chemins) d’un grand octogone parfait autour de ce Cr des Routtes.
En 1662, la carte dressé par Rieul Favier (voir image jointe) sur la commande de Colbert et donc de Louis XIV, montre bien la forêt que nous connaissons encore, ses principales routes traversantes, le « Grand Octogone » avec en son centre, le seul carrefour baptisé à l’époque, le « Cr des Routtes ».
En 1728, sur la carte dressée par Gaspard Baillieul (voir image jointe), on voit 10 carrefours baptisés : Petite Patte d’Oye, Grande Patte d’Oy, Etoille des Amazone (aujourd’hui Cr des Rossignols), le Puit du Roy, Etoille de la Plaine aux Etot (près du Cr Antoinette et de la Mare de l’Arbre Sec), Etoille du Grand Louis (aujourd’hui Cr du Bocquet Gras), Etoille de la Reine, Etoille d’Antin (actuellement Cr du Puis d’Antin), Etoille de Saint-Corneil (Cr Victoire), Etoille des Nimphes (Cr du Puits des Chasseurs)
« Etoille » est alors l’appellation commune d’un point de rencontre de plusieurs voies.
Le « Petit Octogone » (Cr du Moulin, Cr des Arzilliers, Cr des Princes, Cr de Bourgogne, Cr d’Actéon, Cr des Plaideurs, Cr de l’Embrassade, Cr du Marché Dupuis) est une décision de son successeur Louis XV qui a complètement modelé, entre 1728 et 1774, la cartographie de la forêt que nous connaissons encore aujourd’hui en y ajoutant au total 229 nouvelles « routes » (chemins praticables par les calèches et aménagements de ponceaux sur les rus pour aplanir le passage des équipages lancés à pleine vitesse à la poursuite du grand gibier), passant de 226 à plus de 900 kilomètres.
En 1749, on compte 57 carrefours baptisés.
En 1772, on compte 66 carrefours baptisés sur la très fameuse carte « Bussa » (voir image jointe), à la fin du règne de Louis XV. On y lit pour la première fois, les noms des 8 carrefours d’angle du Grand Octogone : Cr des Bordages, Cr du Puits de Berne, Cr d’Aumale, Cr de Bourbon, Cr des Princesses, Cr d’Orbay, Cr du Carnois, Cr du Puits de Royallieu. Les 8 carrefours du Petit Octogone eux ne sont pas encorne nommés sur cette carte.
En 1781, Louis XVI ordonne la création d’un 3ème octogone toujours autour du Puits du Roi, le plus petit, l’ « Octogonet » avec ses 8 nouveaux carrefours : Cr du Vol, Cr d’Atalante, Cr de Jupiter, Cr du Relancé, Cr du Pélican, Cr du Faune, Cr Hippolyte, Cr de Bray). La carte Bussa de 1772 a été mise à jour et augmentée jusqu’en 1820. On y voit tous les noms des carrefours des 3 octogones.
Les poteaux sont entretenus bénévolement par l’association de Sauvegarde du Patrimoine des Forêts du Compiégnois. En 2019, l’équipe a effectuée 18 sorties représentant 153 heures d’intervention pour du nettoyage, de la peinture, pour effacer des tags, pour réparer ou remplacer des planchettes.
En 2004, devant l’état de délabrement généralisé des poteaux, une importante campagne de remise en état est menée par l’ONF (qui fournit et pose les poteaux moulés en béton) et la SPFC qui depuis à la charge de leur peinture et de de leur entretien. Les derniers remis en place sont au Cr Napoléon, au Cr du Lièvre et actuellement au Cr de Crépy.
Document SPFC
Il n’existe aujourd’hui que deux poteaux en métal
- au Cr du Recouvré
- au Cr de
Il n’existe pas de preuves que cette technique ai été massivement utilisée. Sur les cartes postales anciennes qui le plus souvent montrent un équipage de vénerie tout proche d’un poteau de carrefour c’est toujours le poteau blanc à la forme que nous connaissons encore aujourd’hui ; à la seule exception que la « boule » sommitale était alors faite d’un cône vraisemblablement métallique pour faire office de paratonnerre (pure hypothèse)
Il n’existe aujourd’hui qu’un seul poteau en bois, au Cr du Grand Marais, construit en 2005 par l’entreprise Lelu et financé par le Centre des Jeunes Dirigeants d’Entreprise de Compiègne. Au Cr Lucifer, un autre avait fait l’objet de cette même opération caritative mais il n’a pas tenu jusqu’à aujourd’hui et un poteau en béton l’a remplacé.
Deux carrefours plus récents encore ne figurent toujours pas sur la carte IGN 1/25000 alors même qu’ils ont un poteau depuis près de 10 ans :
- le Cr de la Futaie des Amis (parcelle 6042, à l’est de La muette) baptisé en 2011,
- le Cr Pic’Harloup Picardie Valois (parcelle 9111, à l’ouest de la Brévière) baptisé en 2012,
tous deux par les équipages de vénerie qui en portent le nom.
Le poteau posé en 2019 devant l’Office de Tourisme est certes très représentatif de notre identité, mais ne compte pas, tout comme celui qui accueille les visiteurs à l’entrée de Compiègne dans la zone artisanale de Mercières.